Notes personnelles de Armand de Saint Félix
Armand de SAINT FELIX
a conservé les notes qu’il a prises lors des principales
batailles navales menées par SUFFREN en Indes. Ces quatre
feuillets, écrits de sa main, nous permettent de vivre dans
l’intimité d’un brillant officier de Sa Majesté. Ils
permettent également de mieux comprendre les rapports de
SUFFREN, appelé ici le Général, avec ses
officiers.
Dans ces
moments difficiles pour le pouvoir – nous étions à
quelques années de la Révolution française –
le
Roi avait besoin de héros pour stigmatiser la fierté de
la nation. SUFFREN, qui a eu le bonheur de ne pas échouer, se
devait d’être ce héros. C’était
d’ailleurs le nom
de son vaisseau. De nombreux auteurs en ont immédiatement
tracé un portrait idéal qui servira de modèle pour
des générations de marins. Ce déferlement
d’éloges ne suffit pas à expliquer comment,
d'après ses rapports, ce Capitaine de
Vaisseau, ne connaissant pas l’océan indien, a pu diriger
au pied levé une importante escadre, secondé par
des officiers indisciplinés et incompétents sur des
navires en mauvais états et mettre en échec une flotte
anglaise menée de façon remarquable par l’Amiral
HUGHES
qui disposait d’une logistique puissante.
SUFFREN
n’était pas le plus combatif ni le plus clairvoyant des
officiers. On le voit, en particulier à Trinquemalé,
donner des ordres incohérents et se mettre lui-même en
mauvaise posture. On sait qu’il arrangea certains rapports pour
dissimuler ses erreurs et se donner un rôle plus avantageux au
détriment de ses officiers. Il a cependant fait preuve d’un
opportunisme exceptionnel et parfois de génie en prenant des
risques inhabituels pour l’époque. Il a eu le mérite et
l’énergie de diriger des marins pleins d’ambition et de courage,
animés par une agressivité exceptionnelle. A la lecture
de ces notes, chacun pourra apprécier la difficulté de sa
mission.
De
son côté, SAINT FELIX a fait preuve d’un sens inné
du combat, mobilisant une part importante des ressources de l’ennemi.
Il a eu la force d’imposer son point de vue, en particulier pour
l’écartement de certains Capitaines de Vaisseaux. Il semble que
SUFFREN ait suivi son conseil à regret. Enfin, SAINT FELIX a
montré une grande rigueur, dans le respect des ordres, la
conduite de son vaisseau comme dans la rédaction de ses notes
personnelles.
On
peut regretter l’absence de note concernant la bataille de Gondelour
que SAINT FELIX juge insignifiante et « sans
résultat ». Il n’est pas surprenant que
SUFFREN, contraint de ne pas participer directement à la
bataille, ait tenu à écarter SAINT FELIX qui lui
faisait de l’ombre. Malgré une participation exemplaire à
ce combat où il fût blessé, celui-ci ne figure pas
dans les états de service du futur Vice-amiral. La rancœur de
SUFFREN a suivi SAINT FELIX jusqu’au bout. Cela n’enlève rien au
mérite de ce marin exceptionnel.
J'ai fait
figurer à la suite de deux de ces quatre récits des documents certainement
postérieurs qui décrivent les combats de Provédien
et de Trinquemalé. L’écriture est celle de Amand de SAINT
FELIX, mais certains détails laissent penser qu’il n’est
pas le seul auteur de ces commentaires.
du 17 février 1782
Récit de la bataille dite de MADRAS (SADRAS) sur Le
Brillant
(64)
du 12 avril 1782
PROVEDIEN sur Le Brillant
(64)
du 6 juillet 1782
NEGAPATAM sur Le Brillant
(64)
du 3 septembre 1782
TRINQUEMALE sur L’Artésien
(64)
Pour aller plus loin ...
http://www.ifrance.com/asame/francais/events/05_2000/tactique_navale.htm présentation de la tactique navale au XVIII ème siècle.
http://www.stratisc.org/pub/pn/PN3_GRANIERXVI.html La Pensée Navale au XVIII ème siècle, par l'Institut de Stratégie Comparée.
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